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Une nouvelle entité de renseignement pour frapper vite et loin

Texte : Tanguy de Maleissye

Publié le : 24/07/2025. | Temps de lecture Temps de lecture : 4 minutes

Pour la première fois, lors de l’exercice Diodore 25 en mars dernier, le concept de la Task Force Deep a été expérimenté. Cette force composée d’unités de renseignement, d’artillerie et d’aérocombat, aux moyens combinés, est capable de frapper des positions névralgiques adverses. Elle agit dans la profondeur entre 50 et 500 kilomètres derrière les lignes ennemies. En affaiblissant l’adversaire, son action prépare et facilite la relance des forces alliées sur la ligne des contacts.

Il est trois heures du matin. Dans la nuit noire, deux véhicules blindés légers (VBL) amphibies s’enfoncent dans un lac pour rejoindre la rive opposée : ils viennent de franchir les lignes ennemies. Peu après, leurs occupants laissent les véhicules pour une infiltration à pied plus discrète au plus proche des centres névralgiques de l’adversaire. Après avoir réalisé un dossier d’objectifs à base de photos, ces capteurs transmettent les informations et les coordonnées des cibles au Poste de commandement (PC) de l’opération. 

Là-bas, elles sont traitées et prises en compte par le sergent Anaïse. Les autorités décideront ou non d’une action de destruction, soit par des moyens d’artillerie, soit par des hélicoptères d’attaque. Ces actions coordonnées sont au cœur des missions de la Task Force Deep (TF Deep), une force de circonstance agissant entre 50 et 500 kilomètres en profondeur dans la zone ennemie. 

Elle rassemble les savoir-faire des trois brigades du Commandement des actions dans la profondeur et du renseignement : la brigade de renseignement et cyber-électronique, la brigade d’artillerie et la brigade d’aérocombat. Elle a été expérimentée pour la première fois pendant l’exercice Diodore 25, du 21 au 26 mars dernier, sur les camps de Champagne. « 1 500 militaires sont déployés dans l’est de la France, expose le général de brigade Vincent Tassel. L’objectif est de tester la coordination entre toutes les unités de la TF Deep pour expérimenter et accélérer nos processus opérationnels ».

Traiter les informations

La concentration est intense au sein du PC : les données de tous les capteurs humains, électroniques et des drones déployés sur le terrain y sont réceptionnés. Une fois les renseignements traités et synthétisés, le commandement de la TF Deep pourra prendre la décision de faire feu sur les cibles identifiées. La boucle d’actions appelée "renseignement-feux" doit être la plus rapide possible. 

« En une quinzaine de minutes, il faut que l’ordre de tir soit donné pour surprendre l’adversaire. Il faut donc accélérer chaque étape de la boucle en priorisant les sites repérés », explique le sergent Anaïse, opératrice au Centre de renseignement terre pour le traitement des données ennemies. 

En parallèle, à plusieurs kilomètres du PC, le Centre de management de la défense dans la 3e dimension (CMD3D) traite les manœuvres aériennes. La gestion de la 3e dimension, espace aérien, est un enjeu de taille : l’utilisation des drones, l’emploi de l’artillerie et des hélicoptères de combat pour la défense et la destruction de cibles, sont d’autant d’éléments à agencer, orchestrer. « En lien avec l’armée de l’Air et de l’Espace, le CMD3D visualise et coordonne les mouvements aériens amis comme ennemis, pour éviter une saturation ou des tirs fratricides », éclaire le lieutenant Philippe-Auguste, chef du CMD3D.

Le saviez-vous ?

Au sein du CAPR, la 785e Compagnie de guerre électronique est une unité atypique qui teste, expérimente et réalise du matériel de guerre électronique et cyber à destination des régiments de l’armée de Terre. Elle dispose d’une chaîne de production pour proposer des solutions innovantes et "palliatives" aux problèmes opérationnels.

Faire feu dans la profondeur

À la lisière d’un bois, un Détachement d’acquisition en profondeur se prépare à faire voler un drone de recherche par imagerie. Equipée d’un système de mini drone de renseignement et de DT 46, la patrouille observe les lignes ennemies sur une trentaine de kilomètres grâce à une autonomie de plusieurs heures. Elle complète le renseignement en transformant l’information déjà récupérée par un premier capteur électronique, en objectif à traiter. L’artillerie ou les hélicoptères de combat pourront ainsi frapper rapidement et avec précision la cible. 

« Aussitôt l’ordre donné, nous tirons sur les cibles grâce à nos lance-roquettes unitaires. Ces destructions permettent d’avoir une supériorité tactique sur l’adversaire », rapporte le capitaine Lionel du 1er régiment d’artillerie. La TF Deep fusionne les capacités des trois brigades du CAPR pour offrir une unité agile et employable sans délai pour appliquer des feux dans la profondeur et affaiblir les positions ennemies. 

L’exercice Diodore 25, laboratoire à la fois technique et tactique expérimente cette nouvelle structure. C’est une étape dans la transformation de l’armée de Terre et le renforcement de sa puissance de combat dans un contexte du retour des conflits de haute intensité.

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